L’œuvre de Charles Sanders Peirce est restée longtemps confidentielle. En terme de recherche sur les sciences de l’information et de la communication, Peirce est une référence.
Pourquoi Peirce n’est il pas à côté de Freud, de Régis Debray, ou de Wiener ?
– Logicien, il n’a pas eu n’a pas eu de poste universitaire, et est resté longtemps marginal. Ses travaux ont été réellement publiés un siècle après sa mort.
– Le degré d’abstraction de ses recherches a freiné sa compréhension, et la vulgarisation de ses travaux n’a trouvé peu de vulgarisateur.
Peirce un chercheur génial ? Quels apports de Charles Sanders Peirce ?
Une ouverture au-delà des schémas binaires.
Le monde du XXieme siècle, et des siècles précédents, est porté par le binaire, la voie à deux bits, à deux oppositions. Le vrai, le faux. Sans intégrer « l’entre-deux ».
– Dans le domaine technologique : les ordinateurs sont conçus sur le principe du binary digit : l’information ( musique, texte, video ) codée sous une longue forme de 0 et 1.
– Dans le domaine neuro scientifique : le cerveau est une machine de neurones qui s’activent sous l’impulsion électrique : signal (0) ou sans signal (1). Voir le fonctionnement du cerveau et de l’ordinateur, par Von Neumann
– Dans le domaine de l’esprit et des idées : l’étroitesse d’une pensée action / réaction. Fait / Explication de ce fait. Histoire de rassurer l’esprit. Derrière chaque action, une explication qui rassure. Voir le poujadisme, ou l’esprit étroit, par Roland Barthes
Charles Sanders Peirce a apporté aux études des sciences de l’information et de la communication un élément fort, et structurant.
La fin d’une conception de cette binarité. Elle s’est d’abord manifestée dans la linguistique.
Avec Saussure, le langage et la linguistique par exemple se sont réduits au signifiant / signifié. Derrière une image ( un dessin d’un chat ), on trouve le signifiant ( l’image ) et son signifié, ce que l’image signifie : le chat. Il s’agit d’une conception dite dyadique du signe. Plus complexe que cette binarité signifiant / signifié, Peirce introduit un troisième terme.
Les signes, le langage, et plus généralement tous les signes de notre quotidien ( indice, icône, symboles …) dépassent le schéma forme visuelle, palpable / interprétation et rationalisation. Peirce introduit la notion ternaire du signe : le signe, l’objet et son interprétant.
Le signifiant et le signifié existent, mais seulement avec un contexte, une culture, un temps.
Une ouverture sur la pragmatique.
La pragmatique étudie le rapport entre le langage et ses usagers. La communication, le langage ne forment pas une entité autonome à part entière, mais ils sont bien vivants dans un contexte. Ils sont construits en fonction des interlocuteurs, d’une situation. De tous les pragmatistes, Peirce est celui qui réfute avec le plus de clairvoyance l’illusion d’une communication, d’une pensée et d’une raison purement cartésienne, indiscutable.
Pour Peirce, toute connaissance est discursive, c’est-à-dire qu’elle se heurte et s’enrichit d’un processus de relations. La science, par exemple, n’est pas une écriture formelle sur une page blanche d’un cahier, mais un long cheminement de ratures, de heurts, d’allers retours dans une communauté ; où les arguments se pèsent, se réfutent. La communication comme action de coordination.
Une structuration du monde et des idées selon un principe de 3 ordres
Un réel en trois ordres de phénomènes, éléments de base :
Le réel se divise en trois ordres de phénomènes, sous forme de théorème :
« La priméité est le mode d’être de ce qui est tel qu’il est. ».
« La secondéité est le mode d’être de ce qui est tel qu’il est par rapport à un second ».
« La tercéité est le mode d’être de ce qui est tel il est, en mettant en relation réciproque un second et un troisième ».
La représentation du réel se décompose de façon similaire en 3 ordres :
– celui des qualités qui nous affectent ( les signes),
– celui des faits réels qui nous résistent ( les objets matériels ou immatériels ),
– celui des lois de l’univers que nous constatons et construisons tout à la fois ( en tant qu’interprétants ).
Derrière ces 3 ordres, on retrouve les notions d’indice, d’icone et de symbole.
Ces notions fondamentales :
Texte original de Peirce, commenté (indice, icone et symbole)
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