La TwittClasse, ou les nouveaux usages pédagogiques


TwittClass_pédagogie_école_Twitter

la TwittClasse est un nouvel usage dans les pratiques pédagogiques scolaires :
Utiliser le réseau social Twitter pour apprendre aux élèves à utiliser l’écriture.

Et à comprendre les réseaux sociaux ; dans une dimension collective.
Voilà l’objectif de ces nouvelles classes qui s’ouvrent, de manière expérimentale, dans les écoles françaises.
Tweeter c’est faire des fotes d’ortografs en si peu de mots ( 140 caractères ) ?
Pas vraiment ; plutôt une vision moderne de la pédagogie.
Focus !

la réconciliation républicaine avec la technologie

L’école républicaine est là pour apprendre à nos chères têtes blondes l’usage de l’écriture, de la grammaire, de l’orthographe.
La formalisation écrite ( savoir écrire ) est un BaBa des devoirs de l’enseignement.
Utiliser les réseaux sociaux est souvent décrié.
C’est en fait une vraie innovation pédagogique. Qui peut paraître surprenante.
Souvenons-nous :
Régis Debray a formalisé dans les années 1960 le rapport à l’image, aux nouveaux usages :
Dans son tableau, résumant la loi des 3 états , il oppose :

  • la graphosphère ( née avec l’imprimerie ) ,
  • et la vidéosphère ( née de l’image, de la vidéo ).

La première est du domaine du lisible : « je l’ai lu dans le livre ».

Et la vidéosphère dans le visible : « je l’ai vu à la télé », ou sur internet aujourd’hui.

L’imprimerie ( l’écriture ) est de l’ordre de la lenteur, la réflexion ( écrire et apprendre la grammaire prend du temps ).
La vidéosphère, et plus largement les réseaux sociaux, sont instantanés : Twitter prend quelques secondes.
L’école républicaine apprend l’effort, le temps lent de l’apprentissage.
L’usage des réseaux sociaux est instantané, sans effort.
La référence à Régis Debray n’est pas isolée.
Bon nombre de professeurs, avec justesse, insistent sur cet apprentissage.

Long, fastidieux, mais qui donne le cadre intellectuel qui marquera toute la vie.
Parler de Twitter, comme des SMS, c’est s’interroger sur le média concis, et réducteur.
Générateur de dérapages, de fautes.
L’usage du média facile est à intégrer.

Et nos jeunes apprenants l’ont bien compris, comme on le verra plus loin.

Réconcilier les 2 formules est une réussite, pour l’instituteur :
Il réconcilie l’effort, la réflexion, et l’usage rigolo des réseaux sociaux. Tellement drôle de voir son Tweet diffusé partout !

La TwittClasse comme un événement collectif.

ecole_eveil_raison_mediologieLa TwittClasse n’est pas une invitation à twitter chacun dans son coin.

Mais participer à un projet collectif, de la classe toute entière.
Ces projets collaboratifs ne sont pas nouveaux.

Comme le souligne Alexandra Acou, dans son témoignage.
La technique n’est qu’un moyen.

Les usages de participation collectives existent depuis des dizaines d’année :

  • les échanges entre écoles ( ce qu’on appelle les jumelages )
  • la participation des parents dans le projet global de l’école ( les classes neige, classe verte, la fête des écoles, les fêtes des mères et des pères ).

Certaines classes, comme l’indique le professeur qui témoigne, utilisent déjà le mode « participatif » :

jouer aux échecs avec d’autres classes.
Pas besoin de Tweeter.
Mais l’objectif est le même : motiver les élèves dans un mode participatif plus ludique que de réviser ses conjugaisons.

Il existe aujourd’hui en France, 242 écoles environ participant à ce projet, à janvier 2013. [ source  réactualiséetwittclasses.posterous.com ]

L’outil médiologique.

enfant-internet-école-apprentissage-médiologieLe média, ou la technique n’est pas le plus important.

A média, usage.

Ecrire pour écrire, c’est l’objectif de l’instituteur.

  • User de l’intérêt d’écrire, parce qu’il permet de communiquer, et de tweeter, voilà le moyen de motiver.
  • Ne pas apprendre à écrire pour écrire, mais utiliser le média d’écriture comme moyen de communiquer.

L’apprentissage de l’écriture est bien présent dans l’objectif.
Twitter n’est qu’un usage comme un autre.

  • Etre lu est important : souci de l’orthographe plus fort, et lecture ( des autres tweets )
  • Utiliser la spécificité du média, très adaptée au texte simple. le tweethaiku

L’envie d’écrire.

Donner envie de publier, le nouveau journalisme :
Quoi de plus merveilleux que l’ouverture du monde aux enfants. Par la lunette numérique. Et de susciter « l’envie de ».
Après twitter, limité dans les messages, l’étape d’après est de faire référence, et partager les articles qu’on a pu lire sur internet ( la curation ).
Pour un enfant, cette nouvelle fenêtre de liberté, et de responsabilité journalistique permet de franchir, pourquoi pas un nouveau pas : le blog.
Voilà comment la TwittClasse peut se transformer en travail journalistique.

l’apprentissage de la protection sur internet.

confidentialite_internetInternet et les enfants fait peur.
Une TwittClasse a d’ailleurs été fermée, ( la première TwittClass de Haute-Savoie ), par le rectorat, sur le principe.
L’évènement déclencheur, l’atteinte à la vie privée, a été la rumeur de la publication de messages privés sur Facebook.
La CNIL,après enquête, a confirmé que ces informations de violation de la vie privée n’était pas fondée.

Le mal est fait :

la crainte ( qui peut être légitime ) des dérives sur internet, et le souci de protéger l’environnement scolaire .
On lira, sur les peurs récurrentes d’internet : les apocalyptiques d’internet sont de retour.

Les précautions de l’enseignant sont là :

  •  certains ne publient qu’après exercice : on ne tweete pas en « direct ».

Le tweet n’est pas en « live » ou en immédiat, mais réfléchi : fruit de plusieurs jours de travail. écrit sur feuilles de papier.
Après le travail du sens ( ce que je veux dire ), et comment ( la forme ), on s’attache à la grammaire ( être compris ).
La finalisation est ensuite le grand moment sur Twitter.

Les abonnés sur twitter sont surveillés, et la TwittClass ne communique, et ne s’abonne que sur des autres classes.
La vérification de l’identité des followers permet une veille salutaire sur les intéractions avec le monde web.

  • twitter n’est pas utilisé par les enfants ( pas avant 13 ans ) : c’est le professeur qui a un compte twitter.
  • une charte signée par les enfants indique les droits et devoirs de la TwittClasse. L’explication aux enfants permet une vertu pédagogique sur les dangers d’internet. Et de mieux maîtriser cet outil.

Made in DunkerqueJean Roch Masson expérimente cette TwittClasse, dans son école à Dunkerque.

On lira son retour d’expérience dans l’article suivant : « Vous tweetez ? eh bien lisez maintenant ».

 

L’expérience des NTIC, dans une école italienne.

Amis sur facebook ou twitter pour la vie

Amis sur facebook ou twitter pour la vie

Le projet des TweetClass n’est pas nouvelle :
S’intéresser et faire participer les élèves dans une expérience NTIC a été observée, via le projet « MailBox« .

Financé par la DG XXII de la commission européenne, dans le cadre du programme Socrate Open and Distance Learning.
Yves Winkin, dans son ouvrage « Anthropologie de la communication« , nous livre son observation d' »anthropologue » :
En Italie, Yves Winkin s’immisce dans une classe italienne, entre Bologne et Porretta, afin d’observer l’expérience menée dans cette école : l’échange par e-mail entre les élèves d’autres classes.

L’objet est ici identique à la TwittClass : échanger à un moment partagé des emails, via les nouvelles technologies.

« Ce jour-là, Roberta, la maîtresse d’anglais, entre dans la classe de quatrième en brandissant une liasse de feuilles de papier.

( la règle de séparer le monde instantané de la messagerie et l’utilisation par les élèves est la même : pas de relations directes avec l’usage numérique ; la médiation via le papier est de règle ).

Les élèves sont en train de terminer l’exercice qu’elle leur a donné.

L’excitation des enfants à la vue des messages devient difficile à contrôler – continuez votre exercice, demande Roberta.

Les enfants obéissent mais ne peuvent s’empêcher de tourner la tête pour recevoir s’ils ont reçus un message.

Hurlements de joie, course folle à travers la classe. »

Yves Winkin est surpris par la liberté de mouvement, dont semblent jouir les enfants, par l’apparente aisance des enseignants.

Il a le souvenir des bancs bien alignés, de bras croisés.

La correspondance des élèves avec les autres élèves de classe étrangère ne suscite pas d’échanges approfondis :
les enfants parlent plutôt d’eux même que s’intéresser aux autres.

Et parlent de leur environnement immédiat.
Ils ont souvent du mal à remplir plusieurs lignes.

Et ces échanges ne les poussent pas à maîtriser leur correspondance électronique, ni à mieux maîtriser l’orthographe.
Ils utilisent les mots minimalistes, une syntaxe « basique », et envoyés selon une procédure vite routinisée.
Comme le souligne Yves Winkin, « l’essentiel est ailleurs : les enfants retirent un plaisir fou de l’envoi et de la réception des messages ; peu importe ce que ceux-ci disent ».

Comme souvent dans l’outil médiologique : le support, la technique sont toujours nouveaux, mais procèdent de modalités humaines déjà éprouvées.
Le moyen technique n’est que secondaire.
Twitter, comme nouveau facilitateur pédagogique ? 

A suivre !

13 réflexions au sujet de « La TwittClasse, ou les nouveaux usages pédagogiques »

  1. inghilterra xavier

    Excellent article (encore un !) bien pesé… qui personnellement me ramène au thème précédemment abordé à Ludovia12 : plaisir et numérique. Car plus que jamais, l’enjeu pédagogique à l’école et tout particulièrement à l’université n’est-il pas de reconquérir l’intérêt et l’engagement des publics ?
    J’utilise Twitter depuis 1 an maintenant au sein d’une communauté d’apprenants à distance comme canal de médiation pédagogique en complément d’une Plateforme LMS et d’un blog. Je commence à quantifier les apports et les limites du dispositif dans le cadre d’une observation participante qui constitue l’un des terrains de validation de ma thèse en SIC.
    Au plaisir d’échanger prochainement 😉

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