Les nouvelles stratégies du multi-canal

Le multi-canal est l’accès à la même information, sur plusieurs canaux de communication :
je veux consulter mes comptes bancaires.

Je peux en disposer sur un distributeur de billets, à l’agence auprès de mon conseiller clientèle, sur le portail internet de ma banque, etc…
L’arrivée des nouvelles technologies apporte de nouveaux modes de relation, sur ces différents canaux ( smarphone, internet , téléphonie … ).
Multi-canal, cross-canal, trans-canal, omni-canal, voilà les nouveaux concepts clés de l’entreprise.
Prospective, et analyse !

L’homme est déjà multi-canal.

Le multi-canal est une notion apparue avec la technologie d’internet, dans le marketing et le monde de l’entreprise.
Puisque avant l’arrivée du web, le seul canal avec une marque était celui du magasin, où l’on achetait son produit.

La tendance s’est accélérée depuis 2012, comme le montre le graphe des tendances de Google.
Pourtant, le multi-canal est aussi vieux que l’humanité : le premier objet multi-canal, c’est l’homme !

Lorsqu’on parle de canal, on parle de canal de distribution :

Le canal de distribution est la matérialisation du chemin suivi par un bien de son producteur au consommateur.

Il s’agit d’une définition de marketing, mais plus largement, le canal est bien cette matérialisation d’un chemin d’un bout à l’autre ( comme la voie navigable, sens originel du mot canal ).
Le canal fait donc référence aussi à la communication de l’homme, avec son semblable, selon divers canaux.

L’homme en ce sens est intrasèquement muli-canal :

On verra plus loin que cet aspect est essentiel dans le monde du marketing.
Il utilise le canal de la pensée, des mots, du langage.
Mais il utilise surtout le canal de son corps :

Ses gestes, l’intonation de sa voix ; toutes les postures non-verbales qui sont un vecteur de communication, et de signification.
C’est ce qu’on appelle la communication analogique et digitale.

C’est la première leçon à retenir dans le marketing ; la relation commerciale doit utiliser ces différents vecteurs :

Appréhender le consommateur sur la réflexion, et l’argumentaire commercial ; mais aussi sur ce qui « tourne » autour : les doutes entrevus dans un regard dubitatif, un sourire d’acquiescement …
Marcel Mauss a énoncé ce premier principe : le premier objet technique ( avant les usages technologiques d’aujourd’hui ) est bien le corps de l’homme lui-même.

Paul Watzlawick formalise aussi ce fait : la communication n’est pas qu’échange de messages verbaux, mais autant une relation. Les axiomes de la communication.

Ainsi , les canaux de communication , et d’information sont véhiculés par la relation.

Avant qu’une société commerciale se vante d’être innovante, et « multi-canale », elle doit s’attacher à gérer la relation humaine avec ses clients.
Le danger de se plonger dans un XXIeme siècle pendu aux innovations technologiques, est d’oublier le BaBa de la relation.

Et que le premier canal, c’est celui le plus riche, le plus subtil.

Le multi-canal, repenser la relation physique.

L’intérêt des réflexions sur le multi-canal est de revenir sur l’intérêt de la relation entre individus, dans les points de vente physiques.
Retour au magasin du Bonheur des dames, cher à Zola !
Le magasin redevient l’endroit « phare », et incontournable.
La relation virtuelle est immédiate, mais fragile.
C’est l’internaute, le consommateur qui décide de prolonger la relation avec une enseigne commerciale.

Tout s’arrête à tout moment.
Aussi, le magasin, l’objet physique de la marque est essentiel :

C’est là que la relation peut se nouer, se nourrir, se prolonger :
Le conseiller du magasin peut interagir avec le client : il le voit ; le conseiller utilise ces fameux multi-canaux.

D’instinct, il peut entrevoir la typologie de son interlocuteur : une femme, une personne âgée, un connaisseur ou néophyte.
Et peut immédiatement nuancer son propos.

C’est trivial, pensez-vous, mais sur internet, il faut une longue phase aux « robots » pour identifier la cartographie humaine de l’internaute.
Ou il faut capitaliser une masse de donnée importante ( et souvent intrusive ) sur son client, pour identifier son besoin, ses connaissances sur la marque.

le magasin comme canal de la relation cliente : le flagship.

Le « flagship« , traduit par vaisseau amiral, est le produit « phare » de la marque, celui qui redonne le sens, la valeur.
Le « flagship store » est le point d’accroche, l’ancre, le vaisseau où la relation, les valeurs de la marque sont mises en valeur.
C’est le cas par exemple des magasins « Apple Store », qui permettent de rendre concret l’usage, la communauté Apple, sur des produits plutôt vendus sur internet.

On lira cet article : le point de vente jouera l’ambassadeur de la marque.

Le magasin physique, complémentaire du web.

amazon_destruction_emploisLe magasin physique est primordial, même pour les grands acteurs de commerce du web.

En 2014, lors du show annuel de la NRF ( National Retail Foundation ), qui se tient à New York, les acteurs du commerce sont unanimes :

le magasin est encore essentiel, face au web.

Amazon en sait quelque chose : sa stratégie est clairement d’ouvrir des magasins physiques.

Le rachat de la chaîne BestBuy par Amazon a avorté, mais aurait pu permettre au plus grand acteur de VAD Amazon de s’offrir ce qui lui manque encore : le magasin.

L’intérêt du magasin  physique réside dans ces éléments :

  • l’expérience d’enchantement du client qui vit une expérience sensorielle :

Internet ne permet pas de captiver le client comme un magasin où on décline : une atmosphère, un usage des sens ( par la production de parfum , de musique agréable, par la manipulation d’un objet qu’on veut acheter ).

  • la problématique logistique : la livraison au plus près du client.

En logistique, on n’appelle le « dernier kilomètre » de la livraison de produits le maillon entre l’entrepôt et le domicile du client. C’est la dernière étape la plus coûteuse de la chaîne logistique. Avoir un magasin près de chez soi pour retirer la marchandise est essentielle. Voilà pourquoi les points relais, implantés dans des magasins physiques qui ont une autre activité ont permis de réduire les coûts de ce dernier kilomètre.

Le Pop Up Store.

pop_up_store_magasin_ephemere_cross_marketingLe pop up store est le magasin éphémère.

Il permet rapidement ( dans des endroits où une enseigne a fermé par exemple ) de s’installer de manière temporaire, et de proposer un concept qui attire la curiosité.

Dans un monde numérique où tout va très vite, ce concept s’inscrit dans l’ère du temps immédiat.

Le côté éphémère rend l’installation captivante, dans le sens : capter le client.

C’est l’effet de rareté. Elle pousse les consommateurs à profiter de l’aubaine et à s’intéresser au fait que le magasin est temporaire, et qu’il faut se dépêcher pour avoir une offre intéressante. Le parallèle sur le web est le concept des ventes privées, où la rareté des clients « choisis » et des offres limitées pousse à l’achat.

Le pop up store permet également aux entreprises de valider un concept. Voir s’il marche ou pas.

La relation phatique, ou l’expérience de la non-performance.

Le marketing a une ambition et un objectif : l’excellence et la performance.
Cet écueil, ou cette bienfaisance est liée au profil de tous les marketeurs : la performance est dans leur ADN.
Pourtant, dans la relation, et surtout dans la communication, l’erreur, l’incompréhension est récurrente.
Mais là n’est pas l’important.

Ce qui est essentiel, c’est de cultiver et prolonger la relation. Même si elle n’est pas optimale ou satisfaisante.
C’est ce que Jakobson a formalisé sous le concept de « fonction phatique » du langage :
Communiquer c’est initier une relation ( par une blague, un sourire, une incompréhension, un mécontentement ), et tenter de prolonger la relation, la discussion.

Même si elle est houleuse. Le pire, dans une logique commerciale est de répondre au client  » c’est comme ça, allez voir ailleurs si vous n’êtes pas content « .

Car avouer une faiblesse, une erreur, c’est souvent bien perçu.
Et ces pépites d’insatisfactions deviennent des mines d’or pour l’enseigne qui sait les prendre en compte.
Google en use, dans les usages numériques.

Lorsque le navigateur Google Chrome « plante », on y voit pas une erreur « http 500 error« , mais un message « humain » : « Houps.. je crois qu’il se passe quelque chose d’étrange« .
Et cela pousse l’utilisateur à réessayer. Il sait que l’erreur est humaine, et normale…
De même, Google propose des versions non abouties de ses programmes.

Qu’il nomme « versions Bêta ». L’utilisateur le sait, et le comprend [ on sous-estime l’empathie des utilisateurs, lorsqu’ils savent que l’usage qu’ils font des applications Google sont gratuites ].

Cela permet à Google, en lançant ces applications de capter ces erreurs ( et les corriger de manière vertueuse ).

Et de capter l’usage : voir ce qui convient ou pas à l’utilisateur. Ainsi, une fonctionnalité non utilisée est de facto retirée dans une version ultérieure.

Le cross-canal.

Pouvoir accéder sur différents canaux à une information ( l’état de sa commande, les horaires d’ouverture de son magasin ) est devenu légitime et naturel, mais ne suffit plus.

La relation initiée dans un magasin se prolonge sur internet ( pour valider son achat, ou son paiement ).

Le cross-canal est la prolongation de la relation dans le temps, et sur différents canaux :

– je commence un acte d’achat ( 47% des consommateurs préparent leur achat sur Internet avant d’aller en magasin )

– je le poursuis en magasin ( 64% de consommateurs veulent essayer un produit, ou le toucher avant l’achat, ),

– et je le finis où je veux ; en magasin ou sur internet.
La notion du temps, plus que le canal, est importante : l’acte relationnel s’étire dans le temps.

Loin d’une relation ordinaire où la relation se clôt lorsque les deux interlocuteurs ont finalisé leur discussion, ou transaction.
Le cross-canal nécessite donc une traçabilité forte, une historisation de tous les moments, ou points de contact avec une enseigne.
C’est là que les systèmes d’information des entreprises historiques sont limités. Ils ne l’avaient pas prévu.

Le Trans-canal.

Le cross-canal procède d’une logique de processus : savoir à quel moment de l’acte de choix, d’achat, de validation le consommateur se trouve.
Le trans-canal procède d’une autre logique : celle de l’immersion du consommateur dans le monde de la marque.

Sans notion de temps linéaire.
Le trans-canal est la juxtaposition d’expériences différentes du consommateur dans un univers de la marque :
c’est le graal de l’expérience :

Proposer de jouer ( sur facebook par exemple ) avec la marque ; jouer avec les objets de manière ludique dans le magasin, visualiser des vidéos ou publicités, demander et s’exprimer sur le choix du prochain produit, etc…

Ce concept d’appliquer l’univers du jeu dans l’éco-système de la marque, c’est ce qu’on nomme la gamification ( ou ludification ). Sous forme de jeu, l’entreprise capte des informations essentielles sur le client, qui lui ne s’ennuie pas : il joue. Il permet d’éviter les questionnaires fastidieux et enquêtes sur les goûts de l’utilisateur.

Le trans-canal est une immersion du consommateur dans son monde.

L’objet n’est pas de tracer la propension du consommateur à acheter, mais de rendre le consommateur captif, et acteur.
Entretenir cette relation « phatique » que nous avons évoquée plus haut :

Peu importe le résultat, l’important est de garder le « contact ».

L’omni-canal.

Beautiful cyber woman over abstract blue backgroundL’omnicanal est le stade un peu ultime de la relation marketing avec le consommateur.

Le consommateur ne voit plus des canaux : il jongle de l’un à l’autre, et n’a pas à réfléchir au canal qu’il veut utiliser pour le besoin qu’il a.

Les outils numériques ( téléphone, tablette, pc , site internet, application mobile ) devenant naturelles au « connectée », que la définition même du canal n’a plus d’importance. J’oublie comment je communique avec l’entreprise. Que ce soit physiquement dans les boutiques traditionnelles, ou sur tous les usages numériques qu’on développés les entreprises.

L’omnicanal rejoint un peu le transcanal, dans le sens où le consommateur n’a plus conscience de sa relation avec l’entreprise : il joue, il se noit, dans un cocon qu’a préparé l’entreprise pour répondre à ses besoins : ludiques, consommation, prise de commande, etc…

Et l’objectif de l’omni-canal est de fusionner les avantages des magasins physiques traditionnels ( relation, contact, visualisation du produit ) et les avantages du web ( disponibilité permanente, accès depuis son canapé à l’offre produit … ).

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2 réflexions au sujet de « Les nouvelles stratégies du multi-canal »

  1. Ping : Gérer une communication sans issue, l’exemple du service client | Zeboute' Blog

  2. Ping : Jacques Attali l’a prédit, Google le fera. | Zeboute' Blog

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