L’homme dé
Il y a des lectures qui nous distraient.
Il y a des romans qui ne laissent pas indifférents . Et vous marquent pour la vie.
Camus avec l’Etranger par exemple.
Ou l’homme dé, de Rhinehart.
Un roman subversif censuré d’ailleurs dans de nombreux pays.
Alors découvrez ce livre qui changera tout simplement votre vie. Certainement.
Un début d’histoire.
Luke Rhinehart est psychiatre bien installé dans une vie tranquille new yorkaise. Avec une gentille femme et deux enfants.
La routine à gagné le couple et la vie de ce psychiatre malgré les sujets dont ils s’occupent.
Au détour d’une soirée avec les amis psychiatres, ringarde et superficielle, après une partie de poker, un dé est caché.
Un dé qui changera toute la vie du psychiatre et de toute l’Amérique.
Derrière le dé, le psychiatre invente le concept du dé :
« sur le point d’aller me coucher, sur la petite table près du fauteuil d’où le docteur Mann m’avait sermonné, une carte, la reine de pique, posée de telle manière qu’elle paraissait en porte à faux sur quelque chose. je m’approchai, considérai la carte, je compris que le dé se trouvait dessous. Si ce dé marque l’as, pensais-je, je descends violer Arlene. Cela continua à clignoter , – à s’allumer, s’éteindre et se rallumer comme une énorme enseigne au néon, et ma terreur grandit. Mais en pensant : s’il ne marque pas l’as, je vais me coucher, la terreur fondit , remplacée par une agréable excitation, et ma bouche s’enfla d’un rictus gigantesque : l’as, c’est le viol, les autres numéros le lit. Le dé est jeté. »
Je ne révélerai pas la suite. Mais peu importe le résultat du dé :
Rhinehart avait découvert une manière différente de vivre les choses : laisser aux dés choisir son destin.
La roulette russe ou le dé bienveillant.
Le jeu de la roulette russe est largement connu, terrible.
En laissant dans le chargeur du revolver une seule balle, et en tournant la roulette du chargeur, le joueur tire sur la gâchette.
Le revolver sur la tempe. Une chance sur 6 pour mourir.
Le jeu du dé proposé par Rhinehart est moins violent en apparence.
Les dés définissent la décision de ses actes.
Qui n’a pas souhaité un jour qu’on l’aide à décider ?
Pour les indécis, quand il n’ y a pas de bon ou mauvais choix,
Jeter les dés et se conformer à son résultat pair ou impair a un côté ludique et jouissif. De quoi libérer ses neurones pour des futilités.
Quand on hésite entre « mousse au chocolat » ou « glace à la vanille », un petit lancer de dé peut décider, et de manière ludique.
Rhinehart va plus loin, et c’est toute l’histoire qu’il raconte, allant dans les plus grands retranchements.
À la lecture, le lecteur peut parfois rester dans un état de malaise, d’effroi. Les idées de Rhinehart vous renvoient à vos peurs, désirs, convictions.
Les règles du dé écrites par Rhinehart.
Les règles du dé formalisées par Rhinehart dans l’homme-dé sont simples.
Mais peuvent être de plus en plus subtiles.
- La règle numéro 1 de ne jamais remettre en cause le dé.
Si le numéro 3 sort et qu’une le chiffre correspond à l’option « je démissionne de mon boulot », je m’exécute.
L’attrait de l’expérience réside dans l’excitation de devoir réaliser coûte que coûte la proposition.
Évidemment, la proposition est déterminante. C’est le joueur qui les définit. À lui de les choisir, selon son degré d’appropriation du concept de l’homme-dé.
- Règle 2 :
Je choisis les différentes options à décider de la manière suivante :
J’écris quelques propositions sans conséquence en leur attribuant des probabilités.
Exemple : numéro 1 : je vais me balader à la forêt ; numéro 2 et 3: je vais au cinéma pour laisser une décision plus paisible dans mes choix. Et ainsi de suite. - Règle 3 : oser les possibles.
Cette règle proposée par Rhinehart est celle qui fonde toute la condition de l’homme-dé.
Aux propositions que le joueur choisit de manière naturelle, et plutôt classique par rapport à ses façons de vivre, on y ajoute des propositions qui sortent de notre zone de confort. Des propositions plus engageantes. Des propositions qu’on nourrit au fond de soi, mais dont on a un peu peur. Les dés sont là pour aider un peu à prendre des décisions qu’on se refuse.
Exemple : ajouter l’option d’aller faire une déclaration d’amour à quelqu’un qu’on désire mais que nous n’osons approcher.
le libre arbitre est là pour décider a priori des choix possibles. Mais une fois décidés, les dés vous obligent.
Cette loi de pouvoir aller plus loin que ce qu’on voudrait réaliser procède de la même excitation. Choisir les dés pour ne réaliser ce que l’on désire n’est pas digne de l’homme dé.
D’ailleurs Rhinehart reprend ses enfants qui jouent au jeu dé.
Leur fils choisit des jouets qu’il aimerait recevoir. Trop facile… son père lui demande d’ajouter des choses plus désagréables. Comme offrir son cadeau à un nécessiteux.
Cette possibilité du tout possible.
Enfant ou même adulte nous nous jouons avec la réalité . En se demandant ce qu’il se passerait si…
Si le feu passe au rouge, je m’arrête et sort de la voiture et abandonne ma vie.
Si dans la descente de la montagne , je donne un coup de me volant , la vie changerait.
Si la copine me dit pas bonjour ce matin je dois le camp .
Si ma collègue me sourit, je lui dis que je l’aime.
Et ces événements fantasmés se cognent à la réalité.
Tout est oublié.
Le jeu de l’homme dé proposé par Rhinehart propose de jouer avec ces rêves, cet inconscience éveillée en se réalisant.
Osez les dés .
Suivre Rhinehart ouvre des possibilités- tant qu’on en reste maître et décider des pouvoirs positifs du jeu du dé.
C’est un moyen de mieux se connaître, et exploiter tous ses talents. Plutôt que de se forger une personnalité sur quelques traits de caractère, et réfréner d’autres traits, Rhinehart propose de tous les considérer. Et de laisser proposer aux dés certaines tendances qu’on refoule en soi.
Rhinehart étant spychiatre, il utilise la méthode de l’homme-dé pour tenter de guérir ses malades : la dé-thérapie.
« Ma théorie est que nous avons tous des pulsions minoritaires étouffées par la personnalité normale, sont rarement libérées pour entrer en action. l’aspiration religieuse est bloquée par l’assurance qu’on est athée. Votre désir de me crier « assez de bêtises « est inhibé par le sentiment de votre personnalité d’homme juste et raisonnable.
Les pulsions minoritaires sont les nègres de la personnalité. Elles n’ont pas connu de liberté depuis la fondation de la personnalité.
Toute personnalité se résume à une somme énorme de minorités supprimées. Si un homme n’élaborait pas un système solide de contrôle de ses pulsions, il n’aurait pas de personnalité définissable, il serait imprévisible et anarchique, on pourrait même dire libre.
Dans des sociétés stables, intégrées, cohérentes, l’étroitesse de la personnalité avait une valeur ; on pouvait se réaliser avec un seul moi. Ce n’est plus vrai aujourd’hui. Dans une société multivalente, seule une personnalité multiple peut faire l’affaire. »
Rhinehart propose ainsi d’utiliser les dés pour retrouver et éprouver des pulsions de la personnalité réprimée.
« La psychologie occidentale essaie de résoudre le problème en poussant à former une seule personnalité intégrée, à réprimer sa multiplicité naturelle et à se fabriquer un moi unique dominant pour maîtriser les autres. Cette solution totalitaire équivaut à entretenir sur le pied de guerre une grande armée d’energie pour dompter les efforts des moi minoritaires qui veulent prendre le pouvoir. La personnalité normale suppose un état d’insurrection continuel. En dé-thérapie, nous tentons de renverser la personnalité totalitaire. ».
L’homme-dé peut ainsi accéder à la liberté la plus totale. Opter pour tout ce qu’il désire et assouvir. La liberté, c’est vivre sous la contrainte. Avec l’homme-dé de Rhinehart, c’est vivre sous la contrainte libératoire des dés.
Le roman est subversif puisque Rhinehart propose à chacun de choisir des options comme de vivre l’expérience de l’homme saoule, le viol, les actes sexuels, la violence. Et surtout fuir le conformisme. Une anarchie qui peut faire peur…
d’autant que le libre arbitre est dilué dans le choix implacable du dé qui tombe. Tous mes actes sont décidés par le dé. Je ne peux être responsable.
Les adeptes de Rhinehart sont nombreux. Des centres sont créés.
Rhinehart sera poursuivi et recherché par le FBI.
Le roman de Rhinehart est jouissif, car les exemples, les témoignages de ses patients sont hilarants. Par l’absurde des situations comiques et cocasses qui en découlent.
Le nouveau Dieu, le Hasard.
Les dés décident de tout. Le hasard est maître. Rhinehart attribue le couperet des dés à Dieu. La toute puissance.
« Au commencement était le Hasard. Et le Hasard était avec Dieu. Toutes choses furent par Hazard et sans lui ne fut nulle chose accomplie. En Hasard était la vie et la vie était la lumière des hommes.
il y eut un homme envoyé par Hasard, et dont le nom était Luke Rhinehart. Ce fut lui qui vint en témoin, pour rendre témoignage de Fantaisie, en sorte que tous les hommes puissent croire à sa suite. il n’était pas le Hazard mais il fut envoyé pour rendre témoignage du Hasard. Ce fut le vrai Accident qui hasardise tout homme ne en ce monde. Il fut dans le monde et le monde fut fait par lui, et le monde ne le connaissait pas. Mais à tous ceux tant qu’ils étaient qui le reçurent, il donna pouvoir de devenir fils du Hasard, même à ceux qui croient accidentellement , car ils étaient nés non de sang , non par la volonté de la chair, ni par là volonté des hommes, mais du Hasard. Et le Hasard se fit chair et il demeura parmi nous, tout-chaotique, tout-faux et tout-fantaitiste. » Le livre du dé.
La pratique au quotidien.
Dans l’homme dé, Rhinehart suggère une multitude d’idées de jeu.
Certaines sont à écarter ; toutes celles qui peuvent heurter ou blesser autrui. On laissera ces idées dans le roman…
Voici quelques exemple de jeu dé :
– Pratiquer les attitudes émotionnelles : laisser au dés le choix de son émotion, le temps d’une heure, dix minutes, une journée ou une semaine : la joie, la bonté, la pitié, la colère, le mépris.
– Jouer un rôle choisi par les dés sur les propositions : Superman, la voisine, le professeur, la salope.jouer au petit garçon dans un parc… retrouver sa nature de petit enfant.
– Définir ses activités : cinéma, écriture, peinture..
La méthode est ludique, et elle a le mérite de laisser chacun de décider ce qu’il veut en faire. Les possibilités sont exponentielles.
On utilisera la méthode de Rhinehart dans le côté positif.
Lancer les dés pour se bousculer un peu…
Si le 1 et le 4 sort, précipitez vous à lire l’homme dé.
Pour le 2 et 3, relisez cet article.
Pour le 5 et 6, partagez ce billet à vos amis.
Cela peut changer leur vie.
On pourra voir la video récente, dans l »émission de la Grande Librairie, sur France 5, qui a récemment retrouvé l’auteur ! : Rhinehart, l’homme dé.
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