Muni d’une carte téléphonique, introduite dans le téléphone d’une cabine téléphonique, je compose le numéro de mon amour.
adolescent, je pouvais appeler discrètement, et de longues minutes un amour distant.
Le fil de métal croisé sous mes doigts, l’odeur du plastique chaud mêlé à toutes les odeurs de l’humanite qui défile dans la cabine téléphonique.
voilà l’expérience désuette du XXème siècle, celle de la cabine téléphonique.
Retour sur cet étrange phénomène !
La fin des cabines téléphoniques
Les cabines téléphoniques disparaissent peu peu du paysage urbain et de la campagne.
Aujourd’hui la maintenance de ces appareils coûte cher, puisque les cabines téléphoniques sont de moins en moins utilisées.
Le service universel public oblige l’ensemble des opérateurs téléphoniques à financer le réseau Orange, dépositaire du service universel, afin de laisser cet objet urbain disponible pour ceux qui n’ont pas de portable.
Les cabines ne sont plus utilisées en moyenne que trois minutes par jour.
On en compte encore 75 000 en France, alors qu’on en comptait jusque 300 000.
Certains maires de village se battent pour conserver ces cabines. Dans certaines régions inondables, et soumises aux catastrophes naturelles, le réseau filaire classique des cabines téléphoniques est encore la technologie la plus fiable pour pouvoir conserver des réseaux téléphoniques opérationnels. Et d’alerter la population en cas de sinistre majeur.
La décision du gouvernement est pourtant définitive : « Les cabines téléphoniques ont vécu. » rapporte le secrétaire d’Etat au numérique Axelle Lemaire, en 2014.
Le sénat en 2015 a décidé la fin de cet objet. A lire, ici.
L’attente du téléphone.
Devant les résidences universitaires, les campings, les stations de sport d’hiver, longtemps on faisait la queue pour pouvoir appeler un proche : lui dire qu’on était bien arrivé, que tout allait bien.
Cet usage nous semble aujourd’hui surréaliste.
Chacun a son portable, et l’accès à l’autre immédiatement.
l’attente n’existe plus, dans notre monde numérique immédiat.
Il fallait donc attendre patiemment pour pouvoir appeler sa dulcinée. Cette attente d’ un presque rendez- vous, virtuel. Puisqu’il fallait se mettre d’accord sur un horaire. être sur que l’autre est là, à l’autre bout du fil.
On pouvait aussi appeler une cabine téléphonique, en espérant que l’autre était celui au bout du fil, dans la cabine.
Ce moment de grâce, de palpitation avait un brin de liberté, de subversion : personne ne nous surveillait, l’appel était anonyme. On pouvait fuir la promiscuité familiale pour être soi. Être seul.
La cage de verre était certes transparente aux regards de tous, mais enfermé dans cet objet transparent, le discours devenait intime.
L’usage de la cabine téléphonique a également engendré l’objet carte téléphonique, de plastique sur lequel les images, les marques apposaient la publicité. les collectionneurs ont enchanté ce bout de plastique.
De nouveaux usages ?
La cabine téléphonique reste un monument dans le paysage urbain. les cabines de téléphone rouge au Royaume Uni font partie du folklore et du patrimoine British.
Aujourd’hui si elles ne permettent plus de téléphoner, de nouveaux usages détournés apparaissent. c’est la propension de l’être humain à réinvestir des usages éteints.
les cabines de téléphone servent ainsi de hot spot wifi, à New York.
Des lieux pour y placer des défibrillateurs. la localisation stratégique de la cabine téléphonique dans les villes permet la bonne position, l’usage pratique aux usagers.
Ou les utiliser comme des boîtes à livres. C’est l’exemple des cabines à livres. A lire ici
Elles sont le moyen de proposer des livres, de manière solidaire.
L’usage de la cabine comme cabine verte et solaire est né à Londres. A lire ici.
On peut y recharger son téléphone portable. Un effet ironique des nouveaux usages sur les anciens.
Certains artistes se réapproprient l’objet urbain pour des œuvres artistiques.
Quoi de plus intéressant pour un artiste de s’exprimer dans la rue, dans les endroits privilégiés ? Çe sont les créations performatives, temporelles. comme ici, avec le détournement de l’usage en aquarium.
C’est le propre de la création de détourner le regard habituel que l’on a du monde en interrogation.
Adieu la cabine téléphonique, le lieu romantique des années 1980.
Le cérémonial médiologique de l’appel n’est plus. De manière pragmatique, chacun trouve plus facile d’avoir accès aux ondes numériques. De manière sentimentale, romantique, la cabine téléphonique est un ancien usage, jubilatoire, comme le petit billet qu’on écrivait à l’encre. Celui qui demande un effort.
Dans les années 1980, l’usage était moderne. et naturel.
Aujourd’hui il est ce vague souvenir de cet instant, pour celui qui l’a pratiqué.
Le premier usage de l’économie collaborative ?
Dans un monde où l’économie ou consommation collaborative est née, la cabine téléphonique est pourtant l’objet de partage collaboratif par excellence. L’économie collaborative permet de faire vivre des objets peu utilisés individuellement ( la perceuse qu’on partage avec d’autres ). Partager l’usage d’un objet, le téléphone, dans un endroit où il y en a peu ( comme les lieux de vacances, par exemple ) est bien le propre de l’économie collaborative où l’on partage un objet.
Le téléphone est devenu tellement intime, immédiat, et d’une pratique tellement quotidienne, que le téléphone est devenu personnel. même à domicile, dans la famille, chacun a son téléphone, son numéro.
Promis, je t’appellerai. d’un lieu magique, surrané , en bas de chez moi.
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