La nouvelle mondialisation, la fin des classes moyennes

fonction_phatique_jackobson_coiffeurImaginez vous !
Ce matin, en vous réveillant, vous vous trouvez décoiffé.

C’est purement imaginaire 🙂
L’instinct vous pousse à parler à votre smartphone , et lui dire « j’ai une tête horrible aujourd’hui« .
Le smartphone est la première chose qu’on touche le matin après le réveil et parfois sa compagne.
Gentiment votre smartphone vous répondra :

« pas de problème, le coiffeur à 50 mètres de chez vous est disponible vers 10h30. Est ce que je prends rendez-vous ?« . What’s next ?


Ca tombe bien, aujourd’hui je suis en RTT. Et ça, mon smartphone le sait, car c’est aussi mon agenda !
Et comme votre smartphone préféré vous connait par coeur, enfin, surtout, il a stocké vos relevés de compte bancaire gratuitement, il voit que vous êtes dans le rouge.
Alors, merveille, votre smartphone vous interpelle :

« est ce que vous voulez en profiter pour arranger vos comptes ? je peux vous proposer un petit découvert pour 30 euros à rembourser le mois prochain. Vous pouvez signer l’offre chez le coiffeur, je le préviens ».
Arrivé chez le coiffeur, ma teinture préférée est déjà préparée ; le journal people Voici est déjà présenté.

Et le coiffeur me fait juste signer l’offre de découvert bancaire, pendant qu’il me lave les cheveux.
La vie n’est elle pas merveilleuse ?

Cela n’est pas du rêve.

facilite_numerique_chomage_tertiaireVoilà comment notre monde numérique nous rend la vie plus facile.

Tellement facile. Qu’on ne peut refuser.

Heureusement :

  • je ne suis pas coiffeur : je ne donnerais pas les 15% de commission de mon coup de ciseaux à Samsung ou Apple pour le rendez-vous. Même si j’ai obtenu un rendez-vous avec un client qui habite à côté de mon salon ; et que j’aurais de toute manière coiffé.
  • Heureusement, je ne suis pas banquier : je ne serais pas derrière une console toute la journée pour valider des offres pour le client que je connais ( je le croise dans la rue tous les jours au bistro ) mais qui préfère parler à son smartphone.
  • Heureusement, je ne suis pas chômeur : car le monde numérique est en phase, objectivement, de bousculer l’économie du tertiaire et des classes moyennes. Après la fin de l’industrie, la fin de pans entiers du tertiaire est annoncée. Même par les enthousiastes de la vie numérique.

Mon histoire du matin, cela n’est pas du rêve :

C’est la révolution numérique en marche. C’est pour bientôt !

Ce n’est pas de la science fiction.
Relisons cette belle histoire de la journée :
Votre smartphone sait où vous habitez ( ce n’est pas de la science fiction ).
Le smartphone connaît les horaires de votre coiffeur ( ce n’est pas de la science fiction ).
Mieux, votre coiffeur s’est inscrit sur l’application Mecoiffer d’Apple ( l’application est en version béta, ce n’est pas de la science fiction ).
Et il a indiqué ses rendez vous ( l’application Mecoiffer est ultra-conviviale, Apple oblige ! ), et il note scrupuleusement vos habitudes ( le coiffeur obtient des points sur l’application ) : vos magazines préférés, et votre teinture.

L’application Mecoiffer en est friande. Elle revendra au magazine Voici votre intérêt.

Ou vous proposera une publicité ailleurs, sur votre smartphone.
Sur votre agenda numérique, vous êtes bien en RTT : donc le rendez-vous peut être proposé.
Tout va bien !
Votre coiffeur, pour arrondir ses fins de mois est inscrit également sur une application formidable :
pour un certain pourcentage d’opérations ( qui n’ont rien à voir avec la banque ), il est rétribué pour faire signer des opérations bancaires.
Ca ne lui prend pas beaucoup de temps, pense-t-il.
La loi des Etats oblige ( encore ) à certaines contraintes administratives , comme signer des opérations bancaires.
Mon coiffeur peut le faire.
Ce n’est pas de la science fiction : les buralistes se sont lancés dans ces activités annexes de banquier pour juguler la perte due à la baisse de vente de cigarettes.
Le coiffeur peut le faire aussi, et il en est rétribué.

Aux Etats-Unis, la Google Bank ( le projet est en réflexion ) connaît mieux que votre banque traditionnelle l’état de santé de votre compte ; et mieux : Google connait vos habitudes de consommation.

Il sait que vous êtes sur le point de partir en vacances à Bali ( ce n’est pas de la science fiction, vos recherches sont sauvegardées ).
Alors, vous proposer un découvert, c’est une aubaine pour Google qui se reconvertit dans le domaine de la banque.
La proposition est vite calculée par Google ( qui a l’habitude de calculer et de maîtriser des millions de données ).
Ne reste qu’à signer. Ca, c’est obligatoire.
Et c’est pour cela que Google a passé des accords avec les petites gens ( le coiffeur ).
Au shampoing, la signature est faite. Et je vais pouvoir me concentrer sur la lecture de Voici. ( ce n’est pas de la science fiction :) ).

Résultat : le coiffeur est devenu un salarié d’une entreprise américaine, qui ayant le monopole de l’application Mecoiffer baissera mes commissions au fil du temps. Cette entreprise ne paye pas d’impôt en France ; à la différence du coiffeur.

Et dans un cycle infernal, le coiffeur est devenu le petit maillon -ouvrier- de la mécanique d’une industrie tertiaire, made in Local.

La fin de la classe moyenne, et du tertiaire.

google_identite_numerique_big_brotherVoilà comment la mondialisation, qu’on pensait réservée à l’industrie ( les fameux jouets fabriqués par les chinois ) se généralise à des secteurs qu’on pensait « imprenable ».

Car local :

  • un chauffeur de taxi, un banquier, un coiffeur ne sont pas délocalisables.
  • On ne peut pas se faire coiffer par un chinois qui vit à Pékin.
  • On ne peut pas se faire transporter par la société américaine.

Non, par contre, on peut les faire travailler pour des multinationales américaines.
De manière surréaliste, les géants américains loin de nous se sont immiscés dans le local :
pour pouvoir communiquer et échanger avec mes semblables, géographiquement, le numérique a créé un intermédiaire indispensable ( via le smartphone, les applications logicielles, l’ordinateur ).

Et surtout celle des géants américains.

Le sujet est compliqué.

  •  La fiscalité, et l’entorse à l’égalité libérale.

Les géants américains ont bien compris qu’on pouvait faire du profit partout dans le monde, sans payer la fiscalité du pays.
De ce fait, il est difficile pour un entrepreneur français, qui paye la fiscalité locale, de faire jeu égal avec des sociétés qui ne la paye pas entièrement.
Dans un monde libéral qui doit permettre la libre ( et juste ) concurrence, cette paraît inimaginable.
Le protectionnisme prôné par les partis d’extrème droite, ou par Arnaud Montebourg paraît décalé dans un monde mondialisé. Mais pose question.

Ecrire un texte partagé par l’ensemble des acteurs ( la planète entière ) et qui permet de définir où est taxé le travail est une équation difficile à résoudre.
Si j’achète un livre sur Amazon ( un site aux Etats Unis ), sur un smartphone américain, livre qui a été écrit par un auteur Français, et fabriqué en France ( par un éditeur ), livré par un entrepôt dans le Nord de la France : où placer la fiscalité ?

  • L’apogée du numérique américain.

Etre le premier sur un marché émergeant permet d’abord de prendre de l’avance.
Mais surtout de positionner « ses pions », et garder une hégémonie durable.
Ce fut longtemps le cas de Microsoft qui fut le leader incontesté de la micro-informatique dans la seconde moitié du XXième siècle.
Google, Amazon sont devenus les nouveaux géants du web.
Monopolistiques, elles peuvent par leurs fonds de racheter les start-up innovantes qui pourraient leur faire de l’ombre.
Le sujet n’est pas nouveau, il faut repartir de l’histoire et de l’expérience.
Les communications télégraphiques au XIXeme siècle procédaient aux mêmes monopoles : l’union radiotélégraphique née en 1906 à Berlin regroupait 28 états.
et on adopte la règle, de nature impériale : « premier arrivé, premier servi ». La domination anglaise sur les réseaux de communications est criante.
Ce sont les Anglais qui imposent.

  •  Co-partager le monde numérique ?

Certains patrons de grandes sociétés de distribution réfléchissent. Il n’est pas possible de contrebalancer une hégémonie américaine.
De ce fait, s’allier et profiter de l’expérience et de l’avance américaine serait une option.
En France, malgré les discours frileux ou apocalyptiques, les savoirs-faire sont là : la grande distribution ( Carrefour, ou Leroy Merlin acteurs mondiaux ) ; l’expertise scientifique ( les ingénieurs Français et notamment les mathématiques, fer de lance du numérique ) ; etc..
Plutôt que de laisser partir ces trésors, l’alliance « gagnant-gagnant » pourrait être bénéfique.

En synthèse, notre monde, bousculé par la mondialisation a laissé les ouvriers, l’industrie dans un désert fait de souffrances humaines.
L’étape de ces 20 prochaines années est bien celle de notre monde tertiaire.
Si nous ne réfléchissons pas aux moyens innovants de rebondir, faites preuve d’imagination, avant Google :
Derrière chaque métier, coiffeur, informaticien, fleuriste, médecin, instituteur ; une petite application nous mènera à travailler USA.
Vive l’Amérique !

On lira l’article « Jacques Attali l’a prédit, Google le fera » qui trace de manière visionnaire notre monde d’aujourd’hui.

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3 réflexions au sujet de « La nouvelle mondialisation, la fin des classes moyennes »

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