A l’heure où nos politiciens se déchirent sur le mariage homosexuel, s’interroger sur le dit et non-dit de son rapport à l’homosexualité est plus important.
La plupart des pays Européens modernes ont entériné le sujet.
La France, en tant que nation Européenne, n’avait plus trop le choix de rentrer dans la norme :
En Europe des millions de « gays » vivent, et ont droit comme tout citoyen qui paie ses impôts, et qui est intégré dans la vie de société d’être reconnu.
S’attachons ici à l’être présent dans une société normative, dans un aspect plus « opérationnel », plus ancré dans la vie.
Car la vie de ceux qui ont choisi de vivre autrement dans l’homosexualité est déjà présente.
Ils vivent déjà dans une réalité qui n’attend pas la loi. Les faits sont là.
Et le fantasme d’une communauté gay qui détruirait les valeurs de notre société est déplacée : vivre son homosexualité est plutôt un combat, un déni sociétal de soi, des aléas au quotidien qu’une fière revendication qui détruirait notre société.
Entrer dans l’orchestre, c’est vivre avec les autres, et le rejet.
Communiquer, comme le souligne Paul Watzlawick c’est « entrer dans l’orchestre« .
On peut adolescent, ou enfant, ramener ses doutes, ses questionnements à soi, les exprimer , mais cela nécessite un langage. Et d’apprendre les lois du langage et des conventions.
Une expression collective :
il faut utiliser le langage commun, et apprendre les formules de politesses.
Pour un individu différent, comme l’homosexuel ( différent car non dans la majorité de la norme ), le langage qu’il cotoie et qu’il doit intégrer est celui qui le rejette dans son être : l’insulte.
Celle du « PD », parfois taguée sur les murs.
Comme l’indique Didier Eribon, dans « Réflexions sur la question gay » :
« Il faut remarquer que l’injure n’est que la forme d’un continuum linguistique qui englobe aussi bien le ragot, l’allusion, l’insinuation, le propos malveillant ou la rumeur que la plaisanterie plus ou moins explicite, plus ou moins venimeuse. »
Entrer dans la vie, et apprendre à communiquer, c’est intégrer des formules qui sont contradictoires avec la sensibilité de l’homosexuel.
Entrer dans l’orchestre est un peu biaisé. Déjà la fausse note à ne pas faire.
Les conséquences de l’homophobie latente
- beaucoup d’homosexuels refoulent leur identité, parce que le poids de la société, où j’entre ne l’accepte pas.
- l’identité est masquée, mais rend l’homosexuel « pervers », dans le sens où il est dans une situation de « cacher » ce qu’il est. Les bienveillants trouvent bizarre que le gay prenne des précautions . Ce cercle vicieux rend la situation intenable : je ne peux communiquer ce que je suis, donc je le cache, donc je me rends soupçonneux.
La sortie du placard, ou le coming out.
La communication n’est pas que transmettre un message à l’autre.
Fondamentalement, il s’agit de véhiculer à l’autre ce qu’on est, et de se le faire confirmer.
Penser tout seul est une « lubie » et une hérésie que la société occidentale a véhiculée : le penseur de Rodin, nu, qui pense tout seul n’existe pas.
Penser, réfléchir, se construire, c’est échanger, faire une transaction de communication vers l’autre, confirmer ce que l’on pense, ce que l’on est.
C’est l’objet d’une communication sur le « comment je communique », plutôt que « qu’est ce que je communique ».
[ on lira ainsi Erreur de Com’ ? si tu m’aimais tu gouterais l’ail : article qui explique que la communication est autant sur la relation que sur le contenu ]
Ne pas pouvoir dire ce que l’on est, foncièrement, est donc douloureux.
Et de ce fait, beaucoup d’homosexuels sont contraints à cacher, car ils ne peuvent affirmer auprès de leur proches ce qu’ils sont.
Le taux de suicides des jeunes adolescents homosexuels est en ce sens alarmant : il est l’illustration de ce fait : je ne peux dire.
Comme l’indique Paul Watzkawick :
« Aucun châtiment plus diabolique ne saurait être imagine, s’il était physiquement possible, que d’être lâché dans la société et de demeurer totalement inaperçu de tous les membres qui la composent« . [ Paul Watzlawick ]
Le rejet équivaut à : « vous avez tort ». le déni, lui, dit : « vous n’existez pas ».
Et dans beaucoup de famille, le déni est présent. L’acceptation de son enfant homosexuel est souvent mis de côté.
« Tu n’existes pas mon fils. »
Le « coming out » en ce sens, lorsqu’il est possible est un acte fondamental de communication positive :
c’est dire à l’autre ce que l’on est. Et cet acte est irréversible :
Il permet d’entrer dans l’orchestre.
Car heureusement, dans l’orchestre, le violoniste est « gay », et il est là, rassurant…