L’infobésité et le besoin d’une clôture sémiotique de notre monde

Trop de communication tue la communication.

Trop d’information tue l’information.

L’information, à quoi sert elle ?

Et pourquoi aujourd’hui, omni présente, elle permet à chacun de comprendre le monde,

et en même temps on se sent noyé par elle ?

L’information ou la clôture sémiotique.

La sémiologie ou l'étude des signesHistoriquement, l’information, véhiculée par la presse , les médias télévisuels a permis de comprendre ce qui se passait chez soi, et autour de soi.

L’information « utile », c’est celle qui doit nous faire comprendre le monde, et se protéger du monde.

Accéder à la compréhension du monde, c’est avoir les clefs qui permettent de maitriser les choses, de les contenir.

Pouvoir comprendre les guerres, comprendre la différence ( le racisme, l’homophobie, le fanatisme ) est un moyen de survivre dans un monde froid, et violent.

C’est l’objet plus généralement des signes qui nous entourent. Les signes sont une représentation du monde, ne sont pas l’objet lui-même.

Par exemple, la représentation du feu par une image, ou par le mot « feu » nous permet d’appréhender le feu, sans le toucher et se brûler.

De même, un reportage sur la guerre en Afghanistan nous permet , via les images, et des signes de suivre cette guerre, sans en être menacé.

Le signe, par sa représentation reliée à un objet concret, donne la possibilité de manipuler la réalité, à « distance ».

Il nous protège donc de la réalité, nous rassure.

La maîtrise des signes , au delà de la communication ( la langue orale, l’écrit ), installe un écran qui nous permette la survie.

Car n’oublions pas que contrairement au monde animal ( les armes de protection comme le venin des serpents, la vitesse d’une gazelle comme fuite devant l’ennemi ), ou végétal ( sécrétant des substances chimiques de protection, ou les épines de certaines plantes ), l’homme ne peut survivre que par la maîtrise de son espace.

Et par les capacités intellectuelles qu’il a pu développés. Maîtriser aujourd’hui le monde par son I-phone.

Les signes sont une protection, et la culture, qui relie les hommes sur des bases communes de connaissance et de vie en communauté.

La culture relie les hommes, c’est à dire qu’elle fournit un terreau commun. Les conventions d’usage  ( la politesse par exemple ), les habitudes, les rites clôturent notre espace. Des barrières indispensables contre un monde différent que nous ne pouvons comprendre.

Cette clôture, formalisée par le terme de clôture sémiotique, distingue ainsi le monde réel ( par les évènements, les indices , « l’analogique » ) du monde digital ( symboles, signes, communication écrite ).

L’ouverture médiatique ou la fermeture de notre compréhension du monde.

Dans le monde de l’information, la clôture sémiotique s’est longtemps illustrée  dans le monde télévisuel, par le sacro saint journal télévisé.

Grand rendez- vous où toute la nation suivait en direct le discours du président de la République, lorsqu’il devait s’exprimer sur des grandes décisions.

Au XXeme siècle, ces journaux, sur une ou deux chaînes de télévision,  donnaient le sens de ce qui nous entourait. L’expliquait, le clôturer dans cet instant clos de 30 minutes, à 20h00.

L’explosion des chaînes, et des nouveaux médias d’information, a explosé en un sens cette clôture.

dans l’espace :

l’information est partout ; sur des dizaines de chaînes, sur internet ( via les grands sites d’information ), mais aussi par l’aggrégation  ( la « curation » ) en masse d’informations. L’espace informationnel est également mondial : ce qui se passe ailleurs devient bien proche.

dans le temps :

l’information est omni présente, et surtout instantanée. Il est possible via Twitter de suivre le procés de DSK par exemple, en « live », en direct. On n’attend plus le temps où l’on se pose, où on réfléchit, où on a décortiqué l’information. On ne prend plus le recul, propre à la maîtrise des signes qui était un écran de protection, de recul sur la réalité. Non, on s’immerge dans l’information. Sans distance.

Cette surenchère temporelle, spaciale, est formalisée par le terme d’infobésité ( contraction de  information / obésité ).

La définition de l’information [ inventée par Claude Shannon, dans la théorie mathématique de la communication ] est scientifiquement le degré de mesure de la liberté de choix dans les messages, la mesure de l’originalité de la situation.

Par exemple : dire que Paris est la capitale de la France a peu de valeur informationnelle, car parler de Paris, c’est l’associer à la capitale .

Par contre, la « Turquie entrera dans la communauté Européenne en 2016 » est une information, car improbable.

La multiplication de l’information diminue la valeur du message, de cette information, et aboutit à un chaos obèse indéchiffrable.

Les nouvelles clôtures de nos réseaux sociaux.

Les lieux de clôture informationnelle, historiquement portés par la République existent toujours : l’école, le musée, le théâtre. Ils sont aujourd’hui en danger. [ On lira à ce propos Régis Debray, Cours de médiologie générale, ou le retour de l’immédiat ].

Loin d’être apocalyptiques, nous pouvons aujourd’hui déceler dans le monde virtuel de nos médias, et des réseaux sociaux au sens large, une nouvelle agora où l’on échange les même signes, les même codes, la même langue.

  • Les réseaux de contact.

les outils comme MSN, Yahoo Messenger, Facebook  procèdent de cette clôture. Echanger entre soi, entre « amis », entre connaissances. Et se détourner des mondes que l’on ne comprend pas. Cela ne signifie pas un repli sur soi, ou communautaire, mais une clôture culturelle, comme le sont les clôtures géographiques des frontières, ou des clôtures linguistiques comme la langue.

Maitriser le monde, comme on l’a dit, c’est maîtriser les signes, et les manipuler sur le même terreau commun.

  • Les réseaux communautaires ou de contenu.

Les outils de réseau social comme Twitter, Muxlim, BlackPlanet, viadeo permettent de partager les mêmes intérêts, du contenu. Les forums sur les sites ( forum médical, technologique ) sont également des lieux virtuels où l’on réduit le « bruit » de l’information à l’essentiel, à ce qui nous préoccupe.

Ces clôtures sémantiques ( par le contenu de ce dont on partage ) sont dans l’espace d’internet des endroits identifiables, bornés sur la toile. On ne surfe pas de pages en pages, de sites en sites, mais on « reste » sur un même espace : une seule adresse web. Un espace central ( le mur ) , et des espaces de liens ( mes contacts, mes amis )

De quoi rassurer les tribus.

En savoir plus, on lira :

La théorie mathématique de la communication : texte fondamental de la définition de l’information.

Cours de médiologie générale, ou le retour de l’immédiat : texte illustrant l’évolution du média dans notre façon de raisonner.

Les réseaux sociaux aujourd’hui : Les réseaux sociaux en 1991 , selon Régis Debray.

Clôture sémiotique : la clôture sémiotique.

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4 réflexions au sujet de « L’infobésité et le besoin d’une clôture sémiotique de notre monde »

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