Le sens à son travail, travailler le sens

En période de Covid, nombreux ont reconsidéré leur rapport à leur travail.

Rencontre avec Alexandre, un tailleur de pierre. Pour qui restaurer notre patrimoine a du sens..

Le travail est l’activité qui aspire pratiquement toute notre vie. Aussi, trouver un sens à ce que l’on fait est essentiel.

La période du Covid a bouleversé les vies professionnelles de nombreuses personnes. Loin des fichiers Excel.. retravailler la terre, la matière, la vie.

Au détour des journées du patrimoine, le travail des artisans prend un sens particulier.

Rencontre avec Alexandre, tailleur de pierre.

Au détour de l’église de Flers, je croise Alexandre, taillant  consciencieusement une pierre avec un petit burin. 

Il est tailleur de pierre.

Passionné par son travail, même s’il se qualifie de timide, il exprime avec amour son travail.

Bien qu’il soit jeune, Alexandre a commencé très tard son métier. Par hasard. Il a trouvé immédiatement le sens de ce travail.

Lorsque on découvre l’église de Flers bourg, à Villeneuve D’ascq on ne peut qu’être épaté du travail de restauration de l’église.

L’église date du 12eme siècle, détruite et largement reconstruite au XVIeme siècle.

En félicitant Alexandre de son travail, il me réponds : je ne suis là que depuis une quelques semaines. Mais il a taillé quelques pierres qui elles resteront bien plus que quelques semaines..

Alexandre s’occupe sur le chantier de la finition. Quelques pierres à tailler.

Le tailleur de sens et d’exigence

Le tailleur de pierre aujourd’hui est toujours un compagnon du devoir. Du devoir de bien faire. De l’exigence.

Sa formation, cap, bep et après quelques années du compagnon du devoir, le tailleur de pierre est fin prêt à tailler la pierre.

L’intérêt du compagnonnage est de travailler dans différentes régions de France. Selon la géographie de la région, on apprend la taille dans différentes pierres.

Vue la lourdeur des pierres, la plupart des constructions centenaires se fait avec ce qu’on trouve dans le coin. A villeuneuve D’ascq, la carrière de lezennes a côté de la ville a fermé. Les pierres sont acheminées de Poitiers, ou de l’Oise.

Le compagnonnage réunit divers corps de métier. Pas seulement de la construction mais aussi de la restauration. 

Alexandre a choisi le travail de la pierre, bien qu’il trouve que travailler le bois est aussi très intéressant .

Le voici donc sur de chantier qui dure depuis plusieurs années. 

Graver les siècles

Si il y a bien un métier dont le travail est visible, et pour des siècles, c’est bien le tailleur de pierre.

« Après le Covid, il y a eu de nombreuses personnes qui ont rejoint ce travail. Des gendarmes, un infirmier, qui a eu un burn-out, sous la pression de la pandémie « .

La reconversion vers ce métier a du sens.

Ce ne sont pas que des jeunes qui entreprennent ce travail. C’est la question que je lui posais, presque curieux de me dire « pourquoi pas se lancer dans ce travail ? ».

En quoi consiste la restauration ?

Tout d’abord, c’est tenter de conserver au maximum les éléments qui n’ont pas été abîmés. 

C’est respecter l’architecture d’origine. Ainsi, sur l’église de Flers, la restauration n’est pas encore terminée que la façade est déjà verte d’humidité.

« On devrait y ajouter une corniche, mais on ne peut pas. Il faut respecter le travail de l’architecte de l’époque ». 

Il faut tout d’abord examiner les pierres qui peuvent être conservées. Celles qui sont trop abimés sont retirées. 

On retire une pierre sur 20cm, pas plus. 

La restauration ne consiste pas à réplaquer par un mur de pierre de 5 centimetres.

Pour remplacer la pierre, on choisit donc la même matière, depuis les carrières. 

Vu le temps pour pouvoir tailler un bloc de pierre, la technologie aujourd’hui utilise des machines taillant la pierre avec le laser. Elle permet d’accélérer les chantiers. Et laisser le travail le plus intéressant au tailleur de pierres.

Le tailleur de pierre lui affine, et surtout corrige les erreurs de la machine. D’ailleurs la belle pièce façonnée par la machine devant moi a été mal taillée.. À Alexandre de bien terminer le travail.

Lorsque la pierre a été taillée, il faut ensuite y mettre le joint. Toujours à la chaux. Aucun bâtiment historique n’a de ciment, qui est apparu au début du xxeme siècle. 

Le ciment n’est pas le bon matériau : avec l’eau gelée, la pierre finit par s’abîmer et eclater. Le travail pour des centaines d’année nécessite une exigence du matériau.

La postérité du tailleur

Je lance un clin d’œil à Alexandre. « N’es tu pas tenté d’y inscrire ton nom, sur les pierres ? ».

Alexandre sourit. Oui, cela se fait bien. Toujours dans des endroits qui ne sont pas visibles. Seuls les prochains tailleurs de pierre, qui un jour retireront la pierre pour la remplacer le verront.

Lorsqu’on retrouve un nom sur un bâtiment, les restaurateurs tentent de retrouver l’histoire et la famille du tailleur.

Si on trouve aussi des signes du tailleur, c’est qu’à une époque, les tailleurs de pierre étaient payés à la pièce. Aussi le tailleur pointait son travail en laissant sa trace.

Le travail du tailleur est pénible.

Alexandre me raconte qu’au début de la formation, les tendinites sont courantes. Il faut boire beaucoup d’eau et reposer le muscle, avant que les muscles du tailleur deviennent résistants.

La poussière est également dangereuse à respirer. Certaines pierres avec la silice même cancerigenes. Les conditions de travail ont heureusement évolué, avec des masques de respiration, à oxygène.

La transmission du savoir. 

Le chef d’Alexandre explique que la plus grande difficulté est la transmission du savoir. Beaucoup de tailleurs sont sur le point de partir en retraite, et le savoir se transmet oralement et en montrant les gestes.

Avec les problématiques generationnels. Pour un jeune né de la génération Z, arriver en retard est anecdotique. Pas pour l’ancien pour qui l’exigence prime. L’exigence du travail bien c’est de l’exigence partout. Y compris dans les horaires.

La cloche de l’église sonne. Et avec regret, je quitte Alexandre, partant fumer une clope.

Avec le vertige en regardant le haut du bâtiment. Là où le tailleur de pierre a travaillé.

Une réflexion au sujet de « Le sens à son travail, travailler le sens »

  1. Ping : Zeboute vous souhaite de bonnes fêtes de fin d’année. | Zeboute Infocom’

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